Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
12 septembre 2025
Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
Après avoir attaqué la politique commerciale américaine, le président Trump décoche ses flèches sur la politique monétaire de la Réserve fédérale. Fin du mois dernier, Trump a exigé la démission de Lisa Cook, un gouverneur de la Banque centrale à Washington, après l’avoir accusée de fraude. Cette semaine, un juge fédéral a bloqué cette décision. Le gouverneur de la Fed en question peut provisoirement rester mais la dernière attaque du président américain sur la Banque centrale suscite de nouveau des questions sur l’indépendance de la politique monétaire des États-Unis.
Cette année, Trump a déjà fortement critiqué à plusieurs reprises et publiquement la politique de la Fed. Généralement, il invective le président de la Fed, Jerome Powell, sur les réseaux sociaux. Le président estime que les taux ne baissent pas assez vite. Comme il n’obtient pas ce qu'il veut, le président américain a à plusieurs reprises exhorté publiquement le président de la Fed, Powell, à démissionner. Mais Powell ne cède pas. Il est fermement décidé à aller au bout de son mandat de président, prévu en mai de l’an prochain. Trump essaie dès lors de faire pression sur les autres gouverneurs de la Banque centrale. L’objectif est de désigner une majorité de gouverneurs au sein du conseil des gouverneurs (7 membres) qui se rangent du côté de la politique monétaire du président.
À court terme, le président Trump semble avoir un peu ce qu’il veut. Les marchés financiers considèrent que les taux à court terme seront abaissés lors de la réunion sur les taux du 17 septembre. Mais pas de deux pour cent, comme le veut le président, seulement de 0,25 pour cent. Le taux directeur américain arriverait ainsi à un niveau de 4,00 - 4,25 pour cent. En outre, le resserrement attendu des taux n’est pas dicté par la pression politique de la Maison-Blanche. La raison est le refroidissement rapide sur le marché de l’emploi américain. Les chiffres de l’emploi d’août montraient que la croissance de l’emploi s’était quasiment arrêtée pendant l’été aux États-Unis. La Banque centrale restera cependant prudente et ne diminuera pas fortement les taux. En effet, l’inflation est en train de s’envoler aux États-Unis en raison des droits de douane américains qui rendent les marchandises importées plus chères.
Les efforts de Trump pour faire pression sur la Banque centrale déclenchent la sonnette d’alarme de nombreux analystes et économistes. Pendant des décennies, l’indépendance de la Fed était un des principaux atouts des marchés obligataires américains et du dollar. Quel qu’ait été le locataire de la Maison-Blanche – un Démocrate ou un Républicain – les investisseurs pouvaient avoir la certitude que la lutte contre l’inflation était l’objectif principal de la Réserve fédérale. Maintenant que les autorités s’immiscent toujours plus dans la politique monétaire, tout est remis en question. Peut-être la Banque centrale laissera-t-elle à l’avenir l’inflation augmenter plus (sous la pression politique de Trump) que ce que les marchés financiers prennent en compte. Cela peut exercer une pression à la hausse sur les taux à long terme, parce que les investisseurs veulent une compensation supplémentaire pour le risque plus élevé d’inflation. À terme, cela peut aussi peser sur la valeur du dollar car un nombre croissant d’investisseurs voudront détenir moins d’obligations d’État américaines.
Tandis que la discussion porte aux États-Unis sur le nombre de baisses de taux souhaitées par la Fed, il est clair que la Banque centrale européenne (BCE) est arrivée au terme du cycle des baisses de taux. Avec une inflation qui se maintient depuis quelques mois déjà à l’objectif de 2 pour cent (ou qui s’en approche), il n’y a pas de raison pour les décideurs politiques de Francfort de diminuer le taux directeur sous le niveau actuel de 2,00 pour cent. Quant aux taux à long terme en Europe, les investisseurs regarderont avec intérêt la situation politique en France La récente motion de défiance à l’encontre du Premier ministre Bayrou et son remplacement par Lecornu provoquent de nouvelles tensions. Le nouveau Premier ministre a la tâche ingrate de présenter un plan budgétaire pour octobre limitant l’augmentation des excédents budgétaires et la dette publique. En l’absence de consensus politique sur le budget, le taux des obligations d’État françaises (à 10 ans) a dépassé celui des obligations d’État grecques de même durée.
Dans un contexte où de nombreux pays européens sont confrontés à la problématique de l’endettement croissant, Belfius Strategic Research s’attend à ce que les taux à long terme aient plutôt tendance à augmenter dans les prochaines années. Nous prévoyons aussi des différentiels de taux croissants par rapport aux taux allemands pour les États membres européens ayant une dette élevée, comme l’Italie, la France, mais aussi la Belgique.
Sources
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