8 août 2025

Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius

  • L’économie américaine se refroidit rapidement.
  • Au deuxième trimestre, la croissance dans la zone euro résiste mieux que prévu, le reste de l'année s'annonce faible.
  • Nous nous attendons à ce que la BCE maintienne le taux directeur à 2 pour cent encore un certain temps.

L'impact des droits de douane de Trump s'avérerait-il quand même supportable?

Les chiffres du deuxième trimestre montrent que l’économie américaine a enregistré une croissance de trois pour cent, après une légère contraction au cours des trois premiers mois de cette année. Les chiffres sont cependant tronqués par les grandes fluctuations des importations américaines. Les importations de biens et services ont enregistré une augmentation spectaculaire de près de 38 pour cent au premier trimestre. Les entreprises et consommateurs américains voulaient devancer la hausse des droits de douane annoncée par le président américain Trump. Initialement, cela a exercé une pression sur les chiffres de la croissance économique. Le mouvement inverse s’est produit au deuxième trimestre: les importations ont chuté de plus de trente pour cent. De ce fait, les stocks des entreprises américaines ont également enregistré d’énormes fluctuations cette année.

Sans ces éléments volatils, l'économie américaine a toutefois affiché un ralentissement manifeste. La croissance intérieure privée aux USA, qui est la somme des dépenses des ménages et des investissements des entreprises, s’est fortement refroidie au deuxième trimestre.

Les ménages sont devenus plus prudents car ils tiennent compte, à juste titre, d'une augmentation de l’inflation plus tard cette année. Les droits de douane entraînent une hausse du coût des importations de la plupart des marchandises et celle-ci est en grande partie répercutée dans les prix finaux. Chez Belfius Strategic Research, nous nous attendons dès lors à ce que l'inflation des prix à la consommation américaine passe (de 2,7 pour cent en juin) à au moins 3,5 pour cent d’ici la fin de l’année. De plus, les consommateurs sont moins optimistes à propos de l’emploi futur.

Le rapport de juillet sur le marché du travail était inférieur aux attentes et faisait état de fortes révisions à la baisse sur les mois précédents. De mai à juillet inclus, 103.000 emplois seulement ont été créés, contre 380.000 emplois entre février et avril. Le refroidissement brutal du marché du travail a surpris les marchés financiers et la Maison Blanche. Après l’annonce des chiffres, le président Trump a même licencié le chef du Bureau of Labor Statistics (BLS).

L'affaiblissement de la demande sur le marché du travail va sans doute continuer à peser sur la croissance économique après l’été. La perspective d’une augmentation tant de l’inflation que du chômage n'incite pas les consommateurs américains à dépenser.

En Europe, par contre, les dépenses des ménages résistent bien. La croissance des ventes au détail dans la zone euro pour avril et mai a été revue à la hausse et a atteint 3,2 pour cent sur une base annuelle en juin. Vu la résilience des dépenses des ménages, la croissance du PIB s’est avérée meilleure que prévu au deuxième trimestre (+0,1 pour cent sur une base trimestrielle), ce en dépit de la menace d’une guerre commerciale avec les USA. Cependant, la croissance trimestrielle s’est ralentie en comparaison avec le premier trimestre (+0,6 pour cent), mais elle était très faussée au début de l’année. En effet, la perspective des droits de douane américains sur les biens européens a entraîné un ‘front loading’. Les entreprises américaines ont importé beaucoup de produits européens avant l’entrée en vigueur des droits à l'importation.

Sur une base annuelle, la croissance du PIB a toutefois progressé. En comparaison avec le deuxième trimestre de 2024, l’économie de la zone euro s’est accrue de 1,4 pour cent, dépassant ainsi les attentes du consensus de 1,2 pour cent.

À partir de l’été, nous tenons compte d'une moins forte croissance économique, principalement en raison de l’affaiblissement des exportations européennes. L'accord commercial conclu par l’UE avec les USA fin juillet implique des droits à l'importation de 15 pour cent sur la plupart des produits européens, ce qui va peser un certain temps sur les volumes des exportations et la croissance du PIB. Cet impact se marque déjà en Allemagne, où le PIB s’est contracté de 0,1 pour cent au deuxième trimestre.

Les chefs d’entreprises allemands ne sont pas pessimistes pour autant. En juillet, le sentiment des entreprises a augmenté pour le sixième mois consécutif. Cela est dû aux projets du gouvernement Merz qui prévoit d'augmenter fortement les investissements dans les infrastructures et la défense à partir de 2026. Cela pourrait compenser en grande partie l'impact des droits de douane.

Avec une économie européenne où la croissance résiste relativement bien et l’inflation se maintient aux alentours de l’objectif de 2 pour cent, la BCE a peu de raisons de continuer à abaisser le taux. C’est ce qu’a laissé entendre la présidente Lagarde lors de la conférence de presse à l’issue de la dernière réunion monétaire: "We are in a good place". Belfius Strategic Research s’attend à ce qu’après huit baisses de taux en un an, la BCE maintienne le taux directeur à 2 pour cent un certain temps.

Le second semestre de 2025 devient-il plus prévisible maintenant que de plus en plus d'accords commerciaux sont signés entre les USA et le reste du monde? Pas du tout. L'incertitude semble s’atténuer quelque peu par rapport à ces derniers mois mais elle est loin d’être terminée. L’accord entre l’UE et les USA est maintenant en chantier mais de nombreux détails ne sont pas clairs. En outre, la Chine n’a pas encore conclu d'accord avec les USA. L'incertitude ne concerne pas uniquement la politique commerciale. Les marchés financiers se préoccupent de plus en plus de ce que le président Trump envisage de faire avec la banque centrale américaine. Il n’est visiblement pas ravi de la politique du président Jerome Powell et exige une baisse des taux. Le mandat de président de Powell arrive à échéance en mai 2026. Si son successeur donne l’impression que la banque centrale est plus influencée par la pression politique, cela pourrait semer le trouble sur les marchés financiers.

Sources

  • Reuters News
  • Source générale: Belfius Strategic Research

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