Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
16 mai 2025
Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius
Enfin des nouvelles positives pour les marchés financiers, après l’escalade dans la guerre commerciale entre les USA et la Chine depuis plusieurs semaines. Les droits de douane entre les deux pays sont fortement réduits pour une durée de 90 jours. Les produits chinois importés en Amérique sont soumis à une taxe à l’importation de 30 pour cent (au lieu de 145 pour cent), tandis que les produits américains importés en Chine seront taxés à 10 pour cent (au lieu de 125 pour cent). L'accord commercial a apporté un soulagement sur les marchés obligataires et d'actions, qui ont accueilli à bras ouverts la détente entre les grandes puissances.
L'accord temporaire évite que le commerce réciproque entre les USA et la Chine ne s'arrête quasi entièrement et atténuera à court terme le choc direct pour l’économie tant chinoise qu’américaine. Pourtant, les USA ne pourront pas échapper en 2025 à l’impact économique de la politique agressive des droits de douane que le président Trump a annoncée début avril. Les enquêtes réalisées auprès des entreprises montrent que la pression sur les prix s’est déjà fortement intensifiée dans l’industrie manufacturière, anticipant ainsi l’introduction des droits de douane.
En même temps, la confiance, tant des entrepreneurs que des consommateurs, est mise à mal par la politique commerciale chaotique de Washington. Après une année 2024 solide, l’activité dans le secteur des services s’est refroidie cette année et de nombreux projets d'investissement ont été remisés au frigo en raison de l’incertitude. Vu que l'accord entre les USA et la Chine n’est valable que pour trois mois, le risque de nouvelles tensions commerciales subsiste.
Au premier trimestre, la croissance américaine a d'ailleurs déjà été sérieusement impactée par la perspective des droits de douane. Afin d'anticiper les taxes élevées, les Américains se sont hâtés d'importer des marchandises de Chine et du reste du monde. Ces importations records ont entraîné une légère contraction du PIB pendant les trois premiers mois de 2025. Il est plus que probable que nous subirons une correction de cet effet des importations au deuxième trimestre mais la dynamique de croissance cette année aux USA restera largement inférieure à celle de 2024. Nous nous attendons à un ralentissement considérable de la croissance du PIB (Produit Intérieur Brut) à 1,5 pour cent cette année (contre une croissance de 2,8 pour cent en 2024).
La combinaison d’une croissance plus faible et d'une inflation plus élevée ne facilite pas la tâche de la Banque centrale américaine (Fed) en 2025. Le président Trump voudrait un taux directeur plus bas pour soutenir la croissance. Mais la banque centrale à Washington est intraitable. Les risques d'une forte augmentation de l’inflation sont actuellement trop importants pour abaisser le taux d'intérêt. À l’issue de la réunion monétaire début mai, la Fed a annoncé que le taux reste provisoirement inchangé en raison de la trop grande incertitude concernant l’impact des droits de douane sur l’économie. Nous nous attendons à ce que la banque centrale ne modifie pas les taux d'intérêt en juin non plus et à ce qu’elle ne passe à l'action que fin juillet. D’ici là, la banque centrale disposera en effet des chiffres de l’inflation des mois de mai et juin. De plus, la pause instaurée par Trump pour les droits de douane réciproques avec le reste du monde prend fin le 9 juillet. Jusqu’à cette date, les pays qui négocient avec les USA peuvent «bénéficier» d'une taxe réduite sur les importations, à savoir 10 pour cent. Lors de sa réunion monétaire du 30 juillet, la Fed devra dès lors en savoir davantage sur les risques d'inflation et le déroulement de la guerre des droits de douane. Belfius Research s’attend à ce que la banque centrale américaine abaisse encore une fois le taux directeur de 0,25 pour cent (à 4,00-4,25 pour cent), pour introduire une pause plus longue ensuite.
Au premier trimestre, le PIB de la zone euro a augmenté plus fortement que prévu (+ 0,4 pour cent sur une base trimestrielle). Quoique les chiffres détaillés du rapport du PIB ne soient pas encore connus, le renforcement de la croissance est vraisemblablement dû en partie à une augmentation des exportations vers les USA, visant à devancer la hausse des droits de douane américains. Nous pensons que les exportations redescendront à partir du mois de mai. Vu le recul de la confiance des entreprises et des consommateurs en avril, nous nous attendons aussi à un affaiblissement de la demande intérieure ces prochains mois dans la zone euro.
La politique commerciale du gouvernement américain plombe les perspectives de croissance dans le monde entier, mais elle a aussi un côté positif. Le fléchissement de la croissance entraîne une diminution de la demande de matières premières, notamment l'énergie, et pousse leurs prix à la baisse. Depuis l’annonce des taxes mondiales début avril, le prix du baril de pétrole brut Brent a perdu plus de 11 pour cent. Sur la même période, les prix du gaz européens ont chuté de plus de 14 pour cent. Sur les marchés des contrats à terme pour l'énergie, les attentes de prix pour le second semestre 2025 et au-delà ont fortement baissé. Il s’agit d'un revirement en comparaison avec le début de cette année, quand l’inflation liée à l'énergie était encore en hausse dans la zone euro. Vu la baisse des prix de l’énergie et les perspectives sur les marchés, Belfius Research a abaissé les prévisions d'inflation pour la zone euro à 2,0 pour cent en 2025 (venant de 2,4 pour cent) et à 1,9 pour cent en 2026 (venant de 2,1 pour cent).
La baisse des prix de l’énergie donne un argument de plus à la Banque centrale européenne (BCE) pour diminuer le taux directeur. La banque centrale à Francfort avait déjà laissé entendre que la guerre commerciale entre les USA et le reste du monde entraîne un affaiblissement de la croissance économique dans la zone euro, avec des risques baissiers pour l’inflation. De ce fait, il n’est pas impensable que des pays (comme la Chine) qui ne peuvent plus vendre leurs produits aux USA, les exportent à des prix réduits en Europe. Nous nous attendons à ce que la BCE poursuive sa politique de réduction des taux d'intérêt cet été, avec des baisses de taux successives en juin et juillet. Le taux directeur arrivera ainsi à un niveau de 1,75 pour cent.
Sources:
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