Analyse: marché immobilier en Belgique

12 mai 2022


Véronique Goossens
Chief Economist @Belfius

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Belfius Strategic Research a analysé la surévaluation ou la sous-évaluation locale du marché résidentiel belge sur la base de données par commune. Dans le cadre d'une deuxième analyse, le service Études a examiné les caractéristiques qui influencent le plus le prix demandé pour les biens immobiliers résidentiels, sur la base d'une série de données historiques de la plateforme Immovlan.

Surévaluation ou sous-évaluation par commune

La nouvelle étude économétrique de Belfius Strategic Research indique que le marché résidentiel belge est surévalué d'au moins 8,73 pour cent. Au niveau des villes et communes, nous constatons principalement des surévaluations dans le Brabant wallon, avec en tête de peloton, Lasne, La Hulpe et Ottignies-Louvain-La-Neuve. Une grande partie de la province d’Anvers est également surévaluée. Ce sont principalement les communes de Baarle-Hertog, Hoogstraten et Ravels qui se distinguent dans cette province. Dans la Région de Bruxelles-Capitale, les prix des maisons à Saint-Josse-Ten-Node, Saint-Gilles et Ixelles sont en surchauffe. Dans la région de Liège, nous trouvons les ténors à Aubel, Waimes et Spa. En Wallonie, tout l'axe partant de Bruxelles, en passant par Namur, en direction de Luxembourg est surévalué. En Flandre, les communes situées dans le Limbourg à proximité de la frontière avec les Pays-Bas, enregistrent également des prix élevés. Enfin, les prix de l’immobilier à la côte sont également particulièrement élevés. Knokke, Zuienkerke et Blankenberge flirtent avec les sommets.

Quelles caractéristiques influencent le plus le prix demandé ?

Au niveau des caractéristiques de l’habitation proprement dite, une deuxième étude révèle que le nombre de places de parking intérieur et de salles de bains affecte de manière significative le prix demandé pour un logement. Chaque place de parking intérieur fait augmenter le prix de près de 12 %. Une salle de bain supplémentaire augmente également le prix demandé de 12 %.

La consommation d'énergie a également une influence importante. La différence de prix entre les maisons les moins bien isolées et les maisons les plus efficaces sur le plan énergétique s'élève à environ un tiers.

Pour les appartements, la présence d'une terrasse est un facteur déterminant pour faire grimper les prix. Les vendeurs demandent en moyenne 17,45 pour cent de plus pour un appartement doté d'un espace extérieur.

1/ Surévaluation ou sous-évaluation par commune belge et pour l’ensemble du marché

Le modèle économétrique a été alimenté par des données au niveau communal portant sur la période de 2005 à 2020 inclus. Les données prises en considération sont le prix des habitations, le revenu disponible par déclaration fiscale, le taux hypothécaire et le nombre de ménages.

Nous avons ensuite agrégé les données communales afin d’avoir une idée de l’ensemble du marché belge.

a) Facteurs qui influencent les prix sur le marché résidentiel

Revenu disponible

Au niveau belge, nous constatons qu'une augmentation du revenu disponible de 1 pour cent entraîne une hausse du prix des habitations de 1,5 pour cent. Le revenu disponible du Belge se compose de divers éléments, dont le plus important est le salaire. Il comprend également le revenu du patrimoine, les allocations sociales et indemnités. Entre 2005 et 2020, le revenu disponible nominal a augmenté de 53 pour cent, le revenu disponible enregistrant une amélioration manifeste principalement en 2012 et 2013.

Au cours de la même période, les prix des maisons ont grimpé de 75,3 pour cent en Belgique. Ce qui est beaucoup plus que la progression du revenu disponible sur le même laps de temps.

Taux

La politique agressive de taux bas de la Banque centrale européenne à la suite de la crise financière et de la crise de la dette européenne, visant à faire remonter le faible niveau de l’inflation a soutenu l’immobilier par deux canaux. D’une part, l’emprunt est devenu meilleur marché et, d'autre part, les taux des placements classiques à long terme (obligations) ont baissé, de telle sorte qu’il semblait plus intéressant d'investir dans l’immobilier.

Une maison ou appartement sur cinq n’était plus acheté pour être occupé par l’acquéreur lui-même mais pour être mis en location. Mais le vent a tourné récemment. Ces derniers mois, le taux hypothécaire a fortement augmenté en raison de la hausse de l’inflation. De ce fait, le taux moyen d’un crédit hypothécaire a grimpé de près de 1 pour cent par rapport au début de cette année et s'élève actuellement en moyenne à 2,5 pour cent pour un crédit de 20 ans.







Nombre de ménages

Le nombre de ménages influence également le prix des habitations. Une augmentation du nombre de ménages de 1 pour cent entraîne une hausse de 0,03 pour cent du prix des habitations en Belgique. Selon le Bureau fédéral du Plan, le nombre de ménages en Belgique va s’accroître de 7,8 pour cent entre 2019 et 2035, soit 388.096 unités. Dès lors, 24.256 ménages s'ajoutent en moyenne chaque année. Cet accroissement s’explique entre autres par le vieillissement et par le nombre croissant de divorces. De ce fait, le marché immobilier va rester soutenu du côté de la demande.

b) Evolution contrastée du marché résidentiel belge.

Durant la période analysée, le marché résidentiel belge était surévalué de 2010 à 2013 et il enregistre une nouvelle surchauffe depuis 2019. En 2020, la surévaluation s’élève à 8,73 pour cent. En 2021, les prix des maisons ont grimpé en moyenne de pas moins de 7,1 pour cent, de telle sorte que nous pouvons supposer que cette surévaluation se poursuit.




c) Surévaluation ou sous-évaluation au niveau communal.

Lorsque nous passons en revue la surévaluation ou la sous-évaluation par commune, nous constatons une surchauffe principalement dans le Brabant wallon, à Anvers, dans la périphérie de Liège, l’est du Limbourg, à la côte et dans la Région de Bruxelles-Capitale. .

Il est important d’examiner cette surévaluation ou sous-évaluation au niveau local. Si le marché résidentiel à Lasne ou Baarle-Hertog est surévalué, c’est surtout pour les habitants proprement dits de ces communes. Cela signifie que, pour les citoyens de Lasne et Baarle-Hertog, il est devenu plus difficile – vu leur revenu moyen et l’augmentation de la population – de trouver une maison abordable dans leur propre commune. Dans les communes marquées par une surévaluation, il est dès lors intéressant pour les pouvoirs locaux de tenir à l'œil I ’accessibilité des habitations. Grâce à leur politique de logement, ils disposent de leviers pour piloter et démocratiser l’offre.

Il existe également un grand nombre de communes sous-évaluées. Une grande partie de la Flandre orientale reste très abordable, Gramont, Renaix et Zottegem étant les communes les plus sous-évaluées. C’est le cas de Menin, Zwevegem et Courtrai en Flandre occidentale. Dans le Limbourg, il s'agit de Gingelom en Tongres. La province de Hainaut est également marquée par une sous-évaluation importante, principalement Dour, Frameries et Froidchapelle.




Liste des communes : voir annexe

La surévaluation est également un phénomène des capitales provinciales belges. Une surévaluation apparaît à Wavre, Anvers, Leuven, Bruges et Namur. Gand enregistre une forte remontée ces dernières années. Seule Mons accuse une sous-évaluation constante. Les villes de Liège et Hasselt fluctuent aux alentours de l’équilibre.







2/ Sensibilité du prix aux caractéristiques d’une habitation.

Dans une deuxième étude basée sur les caractéristiques d'une habitation, nous avons analysé les facteurs qui influencent le prix demandé pour les habitations. Pour ce faire, nous nous sommes basés sur les caractéristiques indiquées par les vendeurs d'une habitation sur la plateforme belge Immovlan entre 2016 et 2022 inclus.

Le prix d'une maison est fortement influencé par le nombre de places de parking intérieures et de salles de bains. Chaque place de parking intérieur supplémentaire entraîne une augmentation de 11,80 % du prix demandé. Pour une salle de bain supplémentaire, le prix demandé est en moyenne 11,64 % plus élevé.

Durant la crise du Covid-19, les maisons avec jardin étaient très en vogue. Mais nous ne constatons pas pour autant un impact significatif de la présence d'un jardin sur le prix des maisons. Par ailleurs, la superficie habitable et la superficie totale du terrain jouent également un rôle dans le prix d’un bien résidentiel. Une superficie habitable supplémentaire de 10 mètres carrés fait augmenter le prix de 2,4 pour cent.

Mais la consommation d'énergie peut avoir un impact encore plus important sur le prix de vente d'une maison. Logiquement, l’effet sur le prix s'accroît en fonction de la différence entre l'habitation la moins performante (classe F) et la plus performante (classes B, A, A+).

Il existe une différence de prix de 14,58 pour cent entre deux habitations identiques dont l’une a une valeur CPE de F et l’autre, une valeur de D. Cet écart grimpe jusqu’à 30 pour cent en cas d’habitations comparables avec une valeur CPE de B ou plus. L'intervalle de fiabilité (la fourchette de valeurs dans laquelle vous pouvez rendre un verdict fiable) est élevé en cas d’habitations A+ vu le nombre limité d’observations dans la base de données.




Sensibilité du prix aux caractéristiques d’un appartement.

En ce qui concerne le prix demandé pour les appartements, la présence d'une terrasse est une caractéristique particulière qui fait augmenter le prix, de 17,45 % en moyenne. Une salle de bain supplémentaire grimpe le prix de 11,19 %. Une place de parking intérieure est bon pour un prix supérieur de 8,46 %.

Une superficie habitable supplémentaire de 10% fait monter le prix de 4,9%, dans l’hypothèse d'une relation linéaire

La valeur énergétique des appartements est également importante. Quand un appartement consomme 100 kwH par mètre carré par an de plus qu’un autre appartement comparable, le prix demandé baisse de 8 pour cent.

Des appartements comparables dont l’un a une valeur CPE de C et l’autre, une valeur CPE de A ou B, présentent un écart de prix de 22 pour cent. Par rapport aux appartements les moins performants, l’écart s’élève à 30 pour cent. in

À nouveau, l’intervalle de fiabilité pour les appartements de classe A+ est élevé en raison du faible nombre d’observations dans la base de données.


Nous nous attendons à une augmentation de l’influence du niveau CPE sur les prix des maisons et appartements. D'autant plus que la réglementation relative aux objectifs énergétiques européens va encore être renforcée dans notre pays. En même temps, la rénovation énergétique drastique d'une habitation coûte de plus en plus cher. Cela va sans doute pousser à la baisse les prix des habitations énergivores.

3/ Les constructions et transformations coûtent de plus en plus cher.

Ceux qui construisent ou rénovent l’apprennent à leurs dépens actuellement. Les coûts de construction repris dans l’indice ABEX (main d'œuvre et matériaux) ont fortement augmenté ces dernières années. Rien que cette année, nous constatons une hausse de 9,2 pour cent, ce qui est supérieur à l’inflation générale en Belgique. Sur une base historique, nous constatons que les coûts de la construction augmentent toujours un peu plus vite en cas de hausse de l’inflation générale. Nous ne pensons pas qu’une baisse des prix soit pour demain. Nous nous attendons encore à une hausse de prix de 6 pour cent pour l'an prochain. Les causes en sont bien connues. Les problèmes d'approvisionnement perdurent pour le moment en raison de la guerre en Ukraine et des confinements en Chine. À cela s’ajoute une forte demande de matériaux de construction au niveau mondial. Bon nombre de programmes de relance des autorités sont axés sur la construction d'infrastructures. L'économie verdit, comme le parc immobilier, ce qui exerce une forte pression sur les coûts de construction. Au total, nous nous attendons à ce que, sur la période 2020 – 2026, les constructions et transformations coûtent 37,6 pour cent plus cher. Cela freinera peut-être les hausses de prix persistantes considérables que nous avons constatées ces dernières années. .




4/ Depuis 2016, la hausse des prix des maisons s’accélère.

Depuis 2016, la hausse du prix nominal des maisons (non corrigé pour l’inflation) s’élève à 4 pour cent par an en Belgique. Dans la zone euro, les prix ont cependant augmenté encore plus rapidement, soit à un rythme moyen de 4,9 pour cent par an.




Si nous comparons la hausse des prix entre les maisons et les appartements en Belgique, nous constatons que, depuis 2011, les appartements ont augmenté de 3,5 pour cent par an et les maisons, de 3,6 pour cent. Durant cette période, l’inflation générale moyenne était de 1,7 pour cent.




Sur le marché immobilier privé, nous avons assisté ces dernières années à une augmentation du nombre de permis de bâtir en Belgique et beaucoup de projets sont encore en préparation.

Nous remarquons un plus grand nombre de permis pour des appartements que pour des maisons unifamiliales depuis 2003. Auparavant, c’était principalement des maisons d’habitation qui étaient bâties.




Quoi qu’il en soit, le Belge reste essentiellement propriétaire de son logement. 71,1 pour cent possèdent leur habitation, tandis que 28,9 pour cent sont locataires.




Après la forte pression à la hausse de ces dernières années, nous pensons chez Belfius Strategic Research que le marché commence à se stabiliser. Ce qui est sain. Car, sur le plan économique, un marché résidentiel surévalué n’est pas une bonne chose.

Nos prévisions pour le marché immobilier


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