La BCE met en garde contre les faillites dues à la dette

Frank Maet
Senior Macro Economist @Belfius


Véronique Goossens
Chief Economist @Belfius

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  • En dépit de la perspective de reprise économique dans la zone euro, les risques financiers restent élevés, selon la BCE
  • Le surendettement des entreprises fait augmenter le risque de faillites, ce qui peut faire pression sur le reste de l’économie

D’abord la bonne nouvelle: les prévisions économiques dans la zone euro se sont récemment améliorées en raison de la baisse des chiffres de l’inflation et de l’accélération des vaccinations contre le Covid-19. La mauvaise nouvelle est que la pandémie peut générer une hausse des dettes et des bilans médiocres. C’est ce qui ressort en bref du rapport semestriel de la BCE sur les risques financiers dans la zone euro. Si ces points faibles ne sont pas traités, cette situation peut engendrer, selon la Banque centrale, de la nervosité et des corrections sévères sur les marchés financiers ainsi qu’une longue période de reprise économique faible en Europe.

La crise du Covid-19 et les limitations dues au confinement ont causé de gros dégâts dans de nombreux secteurs. Les États ont rapidement décrété des mesures d’aide pour limiter les pertes, ce qui a considérablement gonflé les dettes publiques. De même, les entreprises ont davantage emprunté pour rester debout pendant la crise. La hausse des dettes est la plus importante dans les entreprises qui étaient déjà surendettées avant le Covid-19. Dans ces entreprises-là, le rapport entre la dette et les fonds propres est passé de 220% fin 2019 à plus de 270% au dernier trimestre de 2020.

Le surendettement accroît le risque de faillites si les États réduisent les mesures d’aide Covid-19. Les entreprises surendettées peuvent rencontrer des difficultés à se refinancer, tandis que les revenus restent sous pression, ce qui entraîne des problèmes de paiement et des fermetures d’entreprises. La BCE pointe surtout les PME dans le secteur des services, comme le tourisme et l’horeca, qui sont le plus fortement touchées par la pandémie.

Dans le pire des cas, une crise de la solvabilité dans les entreprises peut contaminer le reste de l’économie. Une vague de faillites fait grimper le chômage, pèse sur le revenu des ménages et le budget de l’État et exerce une pression sur les bilans des banques. Au niveau des États membres, le risque est également réparti de manière inégale, selon la Banque centrale. Des pays comme l’Espagne et la Grèce, qui tirent beaucoup de revenus du tourisme, ou l’Italie, confrontée à une dette publique élevée, courent le plus grand risque.



À partir de mars 2020, les faillites d’entreprises ont fortement reculé dans la zone euro en raison des aides sous forme de compensations, garanties de prêts et reports de paiement. En dépit de la grave récession, le nombre de faillites a diminué d’un cinquième comparé à l’année précédente (voir graphique). Mais la BCE avertit que la tendance peut rapidement s’inverser si l’aide d’urgence s’estompe. En Belgique, en France et aux Pays-Bas, le nombre de faillites a de nouveau baissé au premier trimestre de cette année, mais en Espagne, la hausse est déjà bien marquée. Au cours du premier trimestre de 2021, le nombre d’entreprises espagnoles en faillite a progressé de plus de 16 pour cent par rapport à la même période de l’année précédente. Si cette tendance se poursuit, l’Espagne enregistrera cette année le plus grand nombre de faillites de son histoire. Les statistiques espagnoles montrent clairement que la BCE n’est pas alarmiste dans son rapport sur les risques. Les risques financiers dans la zone euro sont bien plus élevés qu’auparavant pour la période après le Covid-19.


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