23 mai 2025

Rédiger vos dernières volontés n’est pas toujours suffisant...

Lorsque André est décédé à l'âge de 78 ans, tout le monde pensait qu'il n'avait pas rédigé de testament. André était veuf et n'avait pas d'enfants. Son frère et sa nièce, les seuls membres de la famille encore en vie, ont rapidement été informés qu'ils étaient ses héritiers légaux. Le notaire a commencé la déclaration de succession conformément à la dévolution légale.

Mais quelques mois plus tard, un rebondissement inattendu s'est produit. En vidant l'appartement d'André, sa nièce a trouvé une clé… qui s'est avérée ouvrir un petit coffre-fort caché dans la maison. Et là, entre de vieux livrets d'épargne et quelques lettres personnelles, se trouvait un testament manuscrit.

À la surprise de tous, André avait légué tout son patrimoine à son amie et voisine, Clara. Il la remerciait ainsi pour les années de soins, d'amitié et de soutien. Aucune mention de son frère ou de sa nièce dans le texte. Le document était entièrement manuscrit, daté et signé — donc juridiquement valide. Mais personne ne connaissait son existence, et il n'avait jamais été enregistré au Registre Central des Testaments.

Un testament valide, mais découvert trop tard

Il s’en est suivi une procédure administrative complexe. La situation successorale devait être réévaluée, la déclaration de succession antérieure devait être annulée et remplacée, et Clara — qui était en fait l'héritière — devait faire reconnaître juridiquement le testament par un notaire. Pendant ce temps, l’administration fiscale s’était déjà prononcée sur la première déclaration de succession. Des corrections étaient possibles mais la charge de la preuve incombait désormais à la nouvelle héritière.

L'histoire d'André n'est malheureusement pas une exception. Un testament manuscrit — également appelé testament olographe — est entièrement légal, tant qu'il est écrit, daté et signé par le testateur lui-même. Mais il doit aussi être retrouvé pour avoir un quelconque effet. Et c'est souvent là que le bât blesse.

Dévolution légale vs. testamentaire: quelle est la différence?

Sans testament, la dévolution légale détermine qui hérite: d'abord les enfants (ou, s'il n’y en a pas, les parents, frères, sœurs, neveux, nièces…), avec une protection pour le conjoint survivant ou le partenaire cohabitant légal. Dans le cas d'André, le frère et la nièce héritaient donc — à moins qu'un testament ne prévoie une autre répartition.

Une dévolution testamentaire s'écarte du schéma légal. Cela est possible tant que le testateur respecte les règles de la réserve héréditaire (par exemple, la protection des enfants ou du conjoint, le cas échéant). Dans le cas d'André, il pouvait disposer librement de son patrimoine puisqu'il n'y avait pas d'héritiers réservataires.

Mais un testament que personne ne trouve n'a aucun effet juridique. Le droit successoral légal s'applique automatiquement au décès, sauf si un testament valide et connu est présenté à temps.

Comment éviter ce genre de situations?

Il existe différentes manières de s'assurer que votre testament ne soit pas perdu ou oublié:

  • 1. Passez par un notaire

    Un testament rédigé par un notaire — un testament notarié — est automatiquement enregistré dans le Registre Central des Testaments (CRT). À chaque décès, ce registre est systématiquement consulté par le notaire qui traite la succession. Le risque que votre testament soit "oublié" est alors quasi inexistant. Cela vous coûtera cependant quelques centaines d'euros.

  • 2. Faites également enregistrer un testament olographe

    Un testament olographe peut également être signalé à un notaire, qui l'inscrira dans le CRT. Le testament reste alors en votre possession ou est conservé par le notaire, mais son existence est enregistrée. Au décès, on sait alors qu'il y a quelque chose à vérifier. Dans le CRT, ce n'est pas le testament lui-même qui est conservé mais notamment les informations concernant l'identité du testateur, la date du testament et son lieu de conservation. Cette option vous coûtera entre 50 et 100 euros.

  • 3. Mentionnez son existence à une personne de confiance

    Préférez-vous ne pas faire appel à un notaire? Il est alors absolument crucial que quelqu'un soit informé de l'existence et du lieu de conservation de votre testament. Ce n'est pas nécessairement un héritier ; une personne de confiance suffit. Sans cette connaissance, il y a un risque que votre déclaration de dernières volontés disparaisse simplement parmi d'autres papiers.

  • 4. Évitez les coffres-forts sans communication

    Un coffre-fort semble sûr — mais seulement si quelqu'un sait ce qu'il contient et y a accès. Un testament dans un coffre-fort fermé sans information partagée est juridiquement aussi inutile qu'un testament perdu.

Conclusion:

Votre testament est la clé de voûte de votre planification patrimoniale. C'est votre voix après votre décès. Mais cette voix doit pouvoir être entendue. Assurez-vous donc que votre testament soit non seulement juridiquement valide, mais aussi retrouvable et reconnu. Ainsi, vous éviterez que vos proches soient confrontés à des incertitudes, des déclarations doubles ou des conséquences fiscales désagréables.



Cet article contient uniquement des informations générales qui ne tiennent pas compte de votre situation individuelle et ne constitue donc pas un conseil juridique, fiscal ou financier. Les informations sont basées sur la jurisprudence et la loi en vigueur au moment de la rédaction de cet article. Toute nouvelle législation ou évolution jurisprudentielle n’est pas prise en considération dans le cadre de la rédaction de cet article.