3 questions à Nicolas Deltour, Head of Investment Strategy

28 juillet 2025

Nicolas Deltour

Nicolas Deltour
Head of Investment Strategy

Pourquoi les investisseurs réagissent-ils si peu aux nouvelles menaces que fait peser le président Trump sur l’application des droits de douane?

Les investisseurs semblent s’habituer à la versatilité du président. Un acronyme a même été créé pour cela: ‘TACO’ ou ‘Trump Always Chickens Out’. Traduction libre: Trump se dégonfle toujours. Comme nous l’avons déjà écrit, le président américain adopte une tactique étrange de négociation. Tout d’abord, il menace d’appliquer des droits de douane ridiculement élevés et fait ensuite des concessions en vue de peut-être imposer le tarif qu’il visait initialement.

Les marchés financiers se sont adaptés à cette nouvelle réalité: tant que la moyenne des droits de douane avoisine les 10 à 15%, l'impact économique plus large restera vraisemblablement limité. Le rétablissement des Bourses confirme que les investisseurs en actions croient encore à la rentabilité future des entreprises américaines. Provisoirement, le dollar semble être la plus grande victime de la politique de Trump. Une fois de plus, cela démontre combien il est important pour l’investisseur européen d’appliquer le principe de diversification entre toutes les régions et secteurs.

Les investisseurs ne peuvent cependant pas s’autosatisfaire. Le président Trump est tout sauf content de cet acronyme et ne veut certainement pas être considéré comme un ‘dégonflé’. Seul l’avenir pourra nous dire jusqu’où il est prêt à aller pour cela.

Les investisseurs en obligations réagissent également mollement à la hausse de la dette publique que subissent tous les pays développés. Le calme avant la tempête?

Depuis le 10 avril, le taux américain à 10 ans fluctue dans une fourchette de 4,10 à 4,60%. En Europe, nous n’avons pas vu non plus de fortes hausses des taux.

L’économie mondiale plutôt dynamique est sans doute parvenue à calmer les nerfs. Les économies résistent mais ne tournent certainement pas à pleine capacité. On s’attend dès lors à ce que les banques centrales diminuent les taux d’intérêt à court terme, ce qui aura un impact sur les durées courtes et moyennes.

Quant aux durées plus longues (10 ans et plus), nous restons prudents. Les taux d’intérêt à long terme sont dictés par la réalité économique. Compte tenu des dettes publiques élevées, Belfius Research table sur une légère hausse du taux à 10 ans dans un an. Et ces dettes ne baisseront sans doute pas au cours des prochaines années.

Aux États-Unis, la ‘One Big Beautiful Bill1’ générera une forte augmentation de la dette publique américaine ces 10 prochaines années. Actuellement, elle dépasse déjà largement les 100% du produit intérieur brut (PIB). Dans la zone euro, la dette publique excède 100% du PIB en Italie, France, Belgique et Espagne. La hausse des dépenses pour la défense et les infrastructures pèsera encore plus lourdement sur les dettes.Vu l’environnement des taux et les incertitudes persistantes, Belfius recommande de bien diversifier les investissements obligataires sur le moyen terme.

Le dollar américain semble être la seule victime de la politique de Trump. Peut-il encore chuter davantage?

Il est très difficile de prévoir l’évolution des devises. Fin de l’an dernier, la plupart des analystes considéraient que la politique commerciale de Trump entraînerait une hausse du dollar, car il pouvait réveiller l’inflation et provoquer une hausse des taux. En outre, la demande américaine de monnaies étrangères pouvait baisser en raison des droits de douane élevés, mais c’est l’inverse qui s’est produit.

Le dollar pondéré en fonction des échanges commerciaux2 a perdu plus de 10% au premier semestre de l’année. La versatilité de Trump suscite de l’incertitude, de sorte que les investisseurs ont moins confiance dans les actifs américains. Les critiques répétées de Trump à l’égard de Powell, le président de la Banque centrale américaine, confirment les investisseurs dans leur méfiance vis-à-vis du dollar. Selon Trump, Powell traîne trop avant de baisser le taux.

Si Trump conclut des transactions commerciales et se montre un peu plus modéré, le dollar pourrait reprendre quelque peu du poil de la bête. Certainement parce que le différentiel de taux est encore toujours à l’avantage du dollar pour la plupart des pays développés.

1 Cette loi prévoit des investissements, des réductions d’impôt et une série de coupes claires dans les dépenses sociales. Selon les économistes, l’impulsion ainsi donnée à la croissance ne sera que modeste.
2Dollar pondéré en fonction des échanges commerciaux selon l’indice DXY. Le dollar pondéré en fonction des échanges commerciaux est un critère de la valeur du dollar américain par rapport à un panier de valeurs étrangères, chaque devise recevant une pondération sur la base du volume commercial des États-Unis avec le pays concerné.

Ce document, rédigé et publié par Belfius Banque, donne la vision de Belfius Banque sur les marchés financiers. Il ne constitue pas un conseil en investissement individuel ni une recommandation d’investissement ou une analyse indépendante en matière d’investissement. N’hésitez pas à prendre contact avec votre conseiller financier pour un conseil d'investissement personnel. Il examinera avec vous les conséquences éventuelles que cette vision peut avoir pour votre portefeuille d'investissement individuel. Les chiffres mentionnés reflètent une situation à un moment donné et sont susceptibles d’être modifiés.

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