7 octobre 2022

Robbe Van Hauwermeiren
Investment Strategy @Belfius

Le 26 septembre, la livre sterling a temporairement perdu 5% par rapport au dollar et a touché un plancher sans précédent. Cela est dû au mini-budget annoncé par les autorités britanniques. Ce mini-budget, qui n’est pas aussi mini que le suggère son nom, représente la plus grande réduction d’impôt en 50 ans, dont le coût total est estimé à pas moins de £45 milliards. De plus, le gouvernement britannique gèle la facture énergétique des ménages britanniques, ce qui coûterait environ £120 milliards par an. Les autorités estiment que ces mesures de stimulation vont réduire l'inflation à environ 5%. Ces mesures seraient en grande partie financées par une augmentation de l’endettement.


Le marché a réagi très violemment aux dépenses planifiées par les pouvoirs publics. La livre sterling a plongé et le taux d'intérêt sur les dettes publiques britanniques a considérablement grimpé. Les investisseurs se tracassaient concernant la politique financière britannique, ce qui a fait bondir le taux des obligations d’État britanniques à 10 ans au-dessus de 4,5%, le niveau le plus élevé depuis 2008. Cette hausse de taux a eu pour effet que les obligations d’État du Royaume-Uni ont subi un recul de 27% cette année, ce qui représente évidemment des pertes considérables pour les fonds de pension britanniques.1 À cela s'ajoute que la hausse de taux risque d’engendrer de graves problèmes sur le marché résidentiel britannique, où 20% des crédits hypothécaires ont un taux variable.2 L’annonce que la banque centrale procéderait à une hausse de taux d'urgence n'a réussi à soutenir la livre que temporairement. Capital Economics ne s’attend pas à un rétablissement rapide de la devise britannique. L’annulation des mesures par le gouvernement britannique soutiendrait tant la devise que les prix obligataires. Quand le gouvernement a annulé la réduction d'impôt pour les revenus les plus élevés le 3 octobre, le marché a dès lors été soulagé. Mais tous les problèmes ne sont pas résolus pour autant.

Entre-temps, les mesures avaient fait l’objet de critiques de toutes parts. Le 27 septembre, le FMI a lancé une mise en garde contre le fait que des mesures de stimulation fiscale de grande envergure risquent d'aggraver l’inflation actuelle. L’Institute for Fiscal Studies britannique ne suivait pas non plus le raisonnement du gouvernement britannique selon lequel les mesures allaient réduire l’inflation. Au contraire, en stimulant l’économie maintenant, les autorités entravent la banque centrale anglaise dans sa lutte contre l’inflation.3 Par conséquent, la Bank of England va vraisemblablement devoir augmenter encore plus le taux à court terme.

Le 28 septembre, la Bank of England a annoncé qu’elle voulait calmer les marchés en rachetant des obligations d’État britanniques à long terme. Alors que les banques centrales veulent mettre fin à leur politique monétaire souple pour contrer l’inflation, la banque centrale britannique est maintenant contrainte d'acheter plus d'obligations pour éviter que la stabilité financière anglaise soit ébranlée. L'annonce de la Bank of England a entraîné une légère baisse des taux à long terme mais n'a pas réussi à endiguer la chute de la livre sterling.

La situation britannique constitue un avertissement clair pour les pouvoirs publics qui sont disposés à prendre d'importantes mesures budgétaires pour aider les citoyens à payer leur facture d'énergie. Les mesures qui soutiennent ainsi la demande peuvent provoquer une hausse de l’inflation à plus long terme et forcer les banques centrales à mener une politique encore plus stricte. Une dévalorisation de la devise entraîne en outre une hausse du coût des importations et une augmentation encore plus forte de l’inflation. Enfin, une hausse du taux d'intérêt engendre une augmentation du coût de l’endettement d'un pays, justement à un moment où les autorités ont besoin de financement. Il est évident que les pouvoirs publics sont limités dans leur liberté de mouvement.

Bien que l’impact sur l’économie britannique soit considérable, l’effet sur les actions britanniques est moins problématique. L'indice FTSE 100, l'indice d'actions anglaises le plus important, se compose en grande partie d’entreprises exportatrices, qui sont dès lors moins exposées à l’économie nationale. Nous maintenons notre position underweight en actions européennes en général.


1 https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-09-27/bond-market-selloff-shows-no-signs-of-abating-with-uk-losing-27#xj4y7vzkg

2 https://edition.cnn.com/2022/09/27/economy/uk-mortgage-rate-increase/index.html

3 https://ifs.org.uk/articles/mini-budget-response



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