13 septembre 2022

Philippe Evrard

Philippe Evrard
Investment Strategy @Belfius

Ce 8 septembre, la Banque Centrale Européenne a, pour la seconde fois en 3 mois, augmenté son taux directeur de 0,75 %, ce qui correspond aux attentes des analystes financiers. L’absence de précisions sur de futures mesures a quelque peu désorienté les marchés des actions et des changes.

Il est clair que la mission première de la BCE, à savoir garantir une stabilité des prix au sein de la Zone Euro, est mise à mal depuis un an. L’inflation très importante qui nous touche toutes et tous, particuliers, entrepreneurs, artisans, monde associatif ainsi que les pouvoirs publics commence à créer une tension importante. Tous les regards se tournent désormais vers les décideurs publics, quels que soient leur niveau de responsabilité (Europe, Fédéral, local…). La BCE prend ses responsabilités et agit, mais ses moyens d’actions sont-ils suffisants compte tenu des origines multiples de ces hausses de prix ?


Une inflation par l’offre et peu par la demande


Une hausse des taux d’intérêt telle que décidée par la BCE aura un effet sur la demande de biens et services, selon la littérature économique. Cette demande devrait diminuer via l’arbitrage classique entre consommation et épargne. Or ici, l’inflation que nous subissons a principalement d’autres origines :

  • Premièrement, nous sortons d’une pandémie mondiale et toutes les chaînes d’approvisionnement ne sont pas complètement rétablies. En Chine, le covid est encore présent et le gouvernement n’hésite pas à fermer des villes entières pour juguler la prolifération du virus.
  • Ensuite, la guerre économique entre la Russie et l’Europe a fait exploser les coûts énergétiques (gaz, pétrole et en conséquence électricité et même le bois / pellet). Ces coûts énergétiques supplémentaires sont occupés à se répercuter sur l’ensemble de l’économie via les coûts de production de plus en plus élevés (voire intenables) sur le moyen terme. Ce phénomène auto-alimente l’inflation et provoque un effet boule de neige. Soulignons par ailleurs que la balance commerciale de l’Union Européenne (les exportations moins les importations), généralement positive, devient structurellement négative.
  • Toujours en ce qui concerne les coûts de production, les salaires devraient continuer à augmenter ces prochains mois, non seulement par le mécanisme d’indexation automatique, mais également par une pénurie de main d’œuvre qui s’installe progressivement, notamment dans certains secteurs (horeca, santé, transport...).

Changer de modèle économique a un coût


Les crises diverses que nous traversons (pandémie, réchauffement climatique, guerre) ont montré les limites de la globalisation en place depuis des décennies. Désormais, les concepts d’autonomie alimentaire, de souveraineté énergétique et de réindustrialisation européenne alimentent de plus en plus les discussions politiques, jusqu’à la Commission Européenne (ReNew Europe par exemple).

Mais ce redéploiement ne se fait pas du jour au lendemain et engendre inévitablement des coûts supplémentaires en terme par exemple d’infrastructure, de flux énergétique, etc. Ces coûts supplémentaires devraient également venir alimenter l’inflation sur le moyen – long terme.


En clair par rapport à cette hausse de taux


La Banque Centrale Européenne utilise les outils à sa disposition pour tenter de limiter cette inflation. Mais comme on vient de le voir, les effets de cette hausse des taux seront probablement limités car ils ne touchent pas aux origines de cette inflation que sont les problèmes d’offre et les coûts énergétiques démesurés.


Que faire en tant qu’investisseur ?


Le monde de hier et d’aujourd’hui n’aura probablement plus rien à voir avec le monde de demain. Les réponses structurelles à ces multiples crises qui nous frappent commencent doucement à se mettre en place. Des entreprises jouent à fond la carte de cette résilience tant recherchée. Certaines proposent des solutions innovantes dans des domaines aussi variés que l’énergie, le réchauffement climatique, la mobilité, la circularité… D’autres revoient entièrement leur chaîne de valeur pour la mettre au diapason des défis de ce temps.

Il est clair que la relocalisation de nos chaînes d’approvisionnement et la refonte de notre modèle énergétique ne se fera pas du jour au lendemain.

En attendant, tout acteur proposant des solutions, tant pour les ressources que pour l’optimisation de leur utilisation, conserve largement notre préférence lors de nos choix d’investissements.



Ce document, rédigé et publié par Belfius Banque, donne la vision de Belfius Banque sur les marchés financiers. Il ne contient pas de conseil en investissement personnalisé, pas de recommandation d’investissement, ni de recherche indépendante en matière d’investissement. Si vous êtes à la recherche de conseils en investissement personnalisés, vous pouvez vous adresser à votre conseiller financier qui se fera un plaisir d’examiner avec vous les effets éventuels de cette vision sur votre portefeuille d’investissements personnel. Les chiffres mentionnés sont des instantanés et sont susceptibles d’évoluer.